
Agenda des événements autour du livre en Normandie
Cet agenda est collaboratif et non exhaustif. Normandie Livre & Lecture offre la possibilité aux acteurs du livre normand de référencer leurs événements sur cet agenda.
Rencontre avec Rémi Dalisson pour « Maréchal, vous voilà » (Éditions Champ Vallon)
9 mai à 18 h 00 - 19 h 00

Professeur émérite des Universités en Histoire contemporaine, Université/inspe de Rouen, membre du laboratoire du GrHis (Rouen), rattaché à Paris I
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Quand l’hymne officieux du régime de Vichy, Maréchal nous voilà est créé au printemps 1941, Philippe Pétain, chef de « l’Etat français » si peu démocratique qui a succédé à la République, est déjà parti depuis longtemps sur les routes sillonner la zone Sud. Le voyage en province du pouvoir est certes une tradition française utilisée par tous les souverains, empereurs et présidents de la République. Mais cette technique propagandiste est portée à un niveau jamais égalé par le maréchal Pétain, grand habitué des déplacements en province et expert en la matière. Il est en effet ce militaire aux fonctions politiques prestigieuses qui, par ses inaugurations de monuments, conférences ou discours créé dès les années vingt un véritable mythe autour de sa personne confinant au culte de la personnalité. Grâce aux voyages, il apparait comme une sorte de père de la nation réputé proche des Français comme il le fut de ses soldats au Front, grand pourfendeur des faiblesses de la République soutenu par de puissants médias de masse.
Arrivé au pouvoir après une débâcle qui sidère le pays, il reprend ses pérégrinations pour asseoir son pouvoir, peu légitime malgré le vote d’un Congrès tétanisé par la peur, saturer l’espace médiatique, charmer et rassurer des Français désorientés par la défaite et l’occupation, et promouvoir son projet de société. Voyager et visiter le plus de régions, terroirs et communes possible est en outre capital pour un régime vite perçu comme étant à la botte des Allemands après son entré dans la Collaboration en octobre 1940. Le chef de l’Etat, qui incarne le nouveau régime à lui seul comme il sied à tout gouvernement autoritaire et populiste, entend ainsi établir un « dialogue » direct avec les Français et promouvoir ses thématiques résumées par le slogan « travail, famille, patrie ». En l’espace de quatre ans, le « vainqueur de Verdun » effectue près d’une centaine de visites en des lieux savamment choisis, dans une zone Sud sous surveillance vichyste puis allemande après 1942. Il y recrée par le verbe et l’image un roman national identitaire et raciné fondé sur des valeurs diamétralement opposées aux Droits de l’homme. Souvent couronnés de succès car bien préparés, portés par une propagande forcenée et inédite, contestés par des incidents de plus en plus nombreux au fil de la guerre, leur préparation, encadrement, mise en scène triomphale et permanence jusqu’en 1944 révèlent la troublante fascination du pays pour un régime autoritaire antirépublicain.